Le manque de soutien aux proches aidants nuit particulièrement aux femmes : réaction au portrait de la proche aidance du Conseil du Statut de la Femme :
Montréal, le 22 avril 2018 : Le Regroupement des Aidants Naturels du Québec (RANQ) salue le rapport sur les proches aidantes et proches aidants rendu public ce matin par le Conseil du Statut de la Femme. « Ce rapport met en lumière les constats dressés par RANQ à partir des expériences vécues par ses 75 membres qui offrent du soutien aux proches aidants à travers le Québec. Les principaux axes problématiques identifiés par le Conseil du Statut de la Femme sont le reflet des revendications exprimées par le RANQ depuis de nombreuses années », affirme la présidente Johanne Audet.
Être une femme proche aidante augmente le risque d’épuisement et d’appauvrissement
Les femmes sont plus nombreuses que les hommes à soutenir une personne mais sont moins nombreuses à soutenir 2 personnes ou plus. Cependant, la majorité des femmes proches aidantes assument beaucoup plus d’heures de soutien. De plus, la division des tâches liées à la proche aidance demeure trop souvent vissée à une vision traditionnelle du rôle de la femme : les soins personnels ou médicaux, les traitements et l’organisation des soins. Ce sont des tâches qu’elles accomplissent dans plus de 65% des cas une fois par semaine minimum. Et c’est sans parler de la charge mentale liée à l’organisation des soins, qui contribue à l’épuisement et au sentiment de lourdeur des proches aidantes. Or, les différentes compressions dans le système de santé, entrainant un manque d’accès notamment aux soins à domicile et à de l’hébergement spécialisé, créent une disparité de traitement entre les hommes et les femmes. « Ce n’est pas étonnant que l’étude du Conseil du Statut de la Femme montre que les femmes, contrairement aux hommes, vivent un plus grand niveau de stress et plus de difficultés à gérer les aspects relationnels avec le bénéficiaire. Elles sont plus souvent aux prises avec les dysfonctionnements du système de santé, à la difficulté d’y naviguer et au manque de reconnaissance du rôle et de l’expertise des proches aidants par les professionnels. Sans les femmes proches aidantes, penser que le système de santé, domaine lui aussi traversé par des enjeux féministes, serait en mesure de prendre en charge la population vulnérable du Québec est utopique. » ajoute Mélanie Perroux, coordinatrice générale.
D’autre part, ce sont bien souvent elles qui quittent le travail ou réduisent leurs heures travaillées. Actuellement, il existe peu de mesures de conciliation responsabilité d’aidante-travail (ou étude)-famille qui permettent aux proches aidants de ne pas s’appauvrir sur le court et long terme. Réduire les heures de travail entrainerait une perte de revenu d’environ 16 000$/an pour les proches aidants de personnes non ainées et à cela s’ajoute des dépenses additionnelles de 7600 $ par année, peu importe leur niveau de revenu initial. On comprend pourquoi 15% des proches aidants vivent de l’insécurité financière. Malheureusement, les femmes, d’autant plus si elles sont monoparentales, du fait de l’iniquité salariale qu’elles subissent, vivent plus fortement encore cet appauvrissement. « Ce que le rapport montre, c’est que les crédits d’impôts fédéraux et provinciaux, qu’ils soient remboursables ou non, sont des mesures inadaptées et inéquitables pour éviter l’appauvrissement des proches aidantes. Elles sont en effets moins nombreuses à les demander, obtiennent des montants plus faibles que les hommes et il est impossible de confirmer que ces sommes leur profitent réellement à elles. Or, le budget 2018, montre que le seul soutien prévu s’appuie uniquement sur cette vision familiariste et individuelle du crédit d’impôt » regrettent les porte-paroles du RANQ.
L’urgence d’agir pour soutenir les proches aidantes et les proches aidants
Soutenir un proche fait partie des solidarités collectives, il n’est pas normal qu’implicitement, le gouvernement considère que s’il n’est pas en mesure de donner les services, une proche aidante le fera. Les proches aidants ne sont pas un filet social permettant de pallier aux insuffisance du réseau de la santé. Les proches aidants représentent des forces vives qui contribuent à prodiguer des soins et des services de qualité à une population vulnérable. À cet effet, ils permettent des économies importantes pour la société québécoise. Cependant, il est essentiel de rappeler que le rôle de proche aidant est un rôle additionnel aux autres rôles tenus par ces personnes, qui entraine trop souvent de l’épuisement et de l’appauvrissement : ces conséquences ont un coût social, économique et individuel important. En se souciant de leurs besoins on agira davantage en prévention.
Face à l’épuisement des proches aidants, les organismes communautaires tels que le RANQ ont proclamé, dans la stratégie nationale de soutien aux proches aidants intitulée « Valoriser et épauler les proches aidants, ces alliés incontournables pour un Québec équitable » l’urgence d’agir sur les facteurs systémiques contribuant à la santé et au bien-être des proches aidants et, par ricochet, des personnes qu’ils soutiennent. Le RANQ réitère sa demande d’un comité de travail interministériel regroupant les différents acteurs (milieu de la recherche et organismes communautaires) soutenant les proches aidants pour mieux définir ce qu’est un proche aidant et pour prioriser les mesures à mettre en place. Actuellement, seuls les ministères sont invités à un tel comité, ce qui est contraire aux principes de reconnaissance de l’expertise et à la concertation nécessaire à ce type de dossier. Il est nécessaire de changer la culture actuelle des mesures à la pièce : c’est d’une politique globale, incluant tous les enjeux vécus par tous les proches aidants, qu’ils prennent soins de leur conjoint, d’un ami, d’un enfant ou d’un parent âgé que le Québec a besoin, afin d’apporter des mesures équitables pour soutenir le quart des Québécois qui prend soin de la population la plus vulnérable. En mettant en place une telle stratégie, inclusive et transversale, le Québec deviendrait un chef de file au niveau canadien et international dans le domaine, et démontrerait qu’il tient à cœur les avancées sociales améliorant le bien-être de sa population, et plus particulièrement des Québécoises.
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